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Photo du rédacteurBénédicte Monnoye

Petite histoire du temps en trop...

Dernière mise à jour : 3 avr. 2020


Le travail est en suspens, les formations empêchées, les ateliers annulés. A présent, j'ai du temps. J'ai le temps.


Avant on parlait du temps, de la météo mais jamais on ne se préoccupait de tout ce temps.

Avant je me disais: "Quand j'aurai le temps, je visiterai ceci, j'irai là-bas... Si j'avais le temps, j'en profiterais pour faire ceci ou cela."

A présent, j'ai le temps, beaucoup de temps, même le temps de perdre du temps.... Mais parfois le trop de temps, franchement, ça devient oppressant... Ça fait peur ce "trop" de temps. On a peur de le perdre, qu'il devienne du temps perdu qu'il faudra rattraper par la suite.

Les premiers temps, j'ai pallié au plus pressé, je me suis affolée, j'ai emmagasiné les informations, les denrées...

Dans un second temps, je me suis empressée de lister tout ce qui était en attente et que j'aurais enfin le temps de réaliser... Mais c'était sans compter sur tout ce qui serait fermé.

Et la notion du temps est bien différente à présent. Par exemple, pour faire les courses, il faut du temps; écrire une liste la plus complète possible, attendre la permission d'entrer dans le magasin, circuler entre les rayons selon une valse de 1 m 50 de distance...

Dans ce nouveau présent, le temps s'étale. Je perds parfois la notion du temps. Ce temps des il faut, je dois... est révolu. Alors, que faire avec tout ce temps? Comment l'apprivoiser?

Me voilà avec du temps qui nous est donné ou imposé, si vous préférez, pour profiter...Profiter de quoi vous me direz? Profiter de regarder, respirer, écouter... Ne plus courir au plus pressé. Ecouter le silence, écouter son cœur, écouter son enfant...

Malgré ce temps suspendu qui m'est offert, je pourrais vite retourner à juste "faire". Il n'y a qu'à suivre les réseaux sociaux. Plein de propositions nous assaillent...Un apéro par Skype par ci, deux conversations par WhatsApp par là, un cours d'abdos, un temps pour applaudir, une conférence à visionner, un concert à écouter, un film à regarder, un nouveau cours de cuisine en ligne, des experts à suivre, des statistiques à évaluer, une pétition à signer, des commandes à réaliser et pour terminer en beauté, une méditation... Parce que oui, tout est offert pour à nouveau nous occuper. Il faut éviter le vide à tout prix, éviter de se sentir seul, confiné. Ce temps pour se retrouver sera vite grappillé...

Et si, finalement, tout ce temps était là pour nous apprendre à faire le vide, aimer, juste aimer, s'aimer soi encore plus pour aimer mieux ensuite. A ralentir le tempo. A passer en lento, lentissimo, legato et surtout piano, pianissimo. Et si nous laissions les tempéraments staccato e pizzicato pour recommencer en mode lento, da capo.

Prendre le temps de créer, d'écouter de nouvelles mélodies, d'en créer, de caresser les instruments de musique, d'adoucir le temps de leur sonorité..de cuisiner, de se délecter, de sourire, de parler, de jouer aux petites voitures, de réfléchir au temps qui passe, au temps révolu et au temps futur. Le futur... Quel futur?... Aujourd'hui, le futur est notre présent..

Qu'attendons-nous pour faire les choses, pour dire les choses, pour vivre les choses? Peut-être que demain, le temps nous demandera de remballer.

Finie la comédie. La comédie de la frénésie, de l'emportement, de l'emballement, de l'argent à tout prix, de la survie.

La vie, c'est aujourd'hui, c'est maintenant, à chaque minute.

Alors si heureusement pour vous, vous n'avez pas à être sur la ligne de front, et que vous êtes confinés chez vous, en sécurité, essayez de profiter de ce ralentissement.

Si vos enfants vous demandent de jouer avec eux, vous demandent trop de câlins, profitez-en parce qu'un jour ils vous diront que ce n'est plus le temps parce qu'ils sont devenus grands.


Bénédicte Monnoye

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