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Photo du rédacteurcheminsdexils

Tu n’as rien vu (cacher pour ne pas faire souffrir)- N.Vanderlinden


As-tu vu cet homme qui sur le tarmac se lave le visage avec l’eau d’une petite bouteille en plastique ? L’eau on dirait de la sueur qui lui tombe sur le front. Les deux se mêlent. Les deux coulent sur ses joues. Et il cligne des yeux lentement. Regarde il place les mains sur ses genoux et tombe au sol. Reverence. Prière. Il s’effondre. Et se voile la face. Est-ce de la honte non. Sa faiblesse ferait peur. Alors il la dissimule.


As-tu vu cette femme qui sert son enfant très fort? Tout contre elle. Elle a peur qu’on lui arrache. Durant tout le voyage ils sont restés enlacés. Presque fondus l’un en l’autre. Couple pétrifié dans un vain désir de protection. Regarde des bras se tendent vers eux. Et le petit corps virevolte. On dirait un pantin de bois flottant dans l’air. L’enfant tremble. Ces sauveurs sont des bourreaux dans leurs yeux. Et les mouettes rient sur leur passage.


Au loin comme un mirage. Flou comme quand il fait très chaud et qu’on regarde l’horizon et qu’on croit que ce qu’on voit est réel. Ce que l’on voit pourtant est réel. Regarde il y a un radeau rempli de corps morts et vivants. Ils ont échappé à la mort. Vraiment ? Pas sûr.

Ils reviennent de l’enfer et croient que ici, de ce côté-ci, ça ne peut pas être pire. Ils ont l’impression d’être morts et d’être rené cent fois depuis le premier cri pour chercher de l’air. Des cendres de la mort. Une de plus une de moins. Mais pas la dernière non pitié pas la dernière. Ce sont des survivants oui. Ont-ils été sauvés par Dieu? Seule l’Histoire le dira.

Mais de ce côté-ci le monde n’a pas la gueule du paradis. Ou si c’est le paradis ça n’est pas Dieu alors qui l’a créé se disent-ils.


C’est l'histoire qui recommence

Quelque part entre l’enfer et le paradis

La terre est devenue le purgatoire

La terre est devenue le purgatoire

Cela ressemble au commencement du monde

Cela ressemble a la fin du monde


Regarde ces images. Elles sont intolérables. Mais regarde ouvre les yeux grands il y a le monde qui sombre. Les ailes des oiseaux sont noires les forêts incandescentes chassent la vie avec des lance flammes. Des villes entières sont mises en quarantaine. Des pays entiers sont en guerre. Regarde comme ils fuient de partout. Mais pour aller où. Il n’y a plus de refuge. Mais une grande forteresse aux murs capitonnés. Le monde a deux côtés. Une grande catastrophe l’a transfiguré. Et nous nous vérifions chaque jour que nous sommes bien à l'intérieur. Enfer et paradis. Eux et nous. Chanceux et non chanceux. Ceux qui regardent la vie devant un écran comme si c'était un film. Et ceux qui la vivent comme un cauchemar. Acteurs et voyeurs coureurs ingénieurs mangeurs buveurs travailleurs serveurs dépenseurs globe-trotteurs leaders consommateurs consommateurs consommateurs

ok je suis bien à l'intérieur.


Il est tard maintenant. Il faut éteindre l'écran de l’ordinateur et aller se coucher. Fermer les paupières et dormir.


Nathalie Vanderlinden.

Poème publié par la Fondation Thalie en 2020.

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Crédit photographique: Jeannine Saintes
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